Quand j’ai ouvert la porte de la maison, voyant mes deux Parson/Russel faire demi-tour, j’ai compris que la journée commençait mal.
Sudiste exilé pour l’amour d’une bretonne, une journée qui commence mal, c’est une journée où il pleut des cordes. Quand elle commence bien les gouttes sont plus fines…….. Pour cette journée « chevreuil sous la pluie », je décide de faire simple et étanche côté habillement, je laisse de côté le camouflage 3D et la casquette Saggy qui se gorgeraient d’eau en un quart d’heure. La veste et le pantalon des journées de chasse à l’aigle iront très bien, côté coiffure, je ressors une casquette minimaliste d’il y a 30ans.
Je me refuse à exposer mon longbow Hill Wesley à cette pluie bretonne, le Bearcat avec son camouflage tissu ne fera pas l’affaire non plus, j’opte pour le PSE SS qui ne sert d’ordinaire que pour les ragondins. Après les formalités d’usages et les consignes donnée par Francis, nous voilà partis.
Mon poste est un peu à l’intérieur d’une forêt dont l’angle d’un champ oblige les chevreuils, désireux de rester à couvert, à fréquenter les broussailles. Je suis en position, le temps s’écoule et la pluie aussi, j’aurais dû prendre un chapeau, des gouttes cascades de ma casquette dans le col de ma veste. Une heure s’écoule en pensées vagabondes et en coups d’œil scrutateurs du moindre mouvement. Francis fait le rabatteur et arrive sur ma droite à 30m quand soudain deux chevreuils déboulent de ma gauche sans emprunter les coulées prévues. Une grande chèvre s’arrête à 20m, trois quart arrière, l’autre et plus près mais trop masquée par la végétation. Je l’ai dans le viseur du PSE, j’arme et je jette un œil vers Francis pour vérifier qu’il n’est pas lui aussi sur la trajectoire, se faisant, j’oublie le pin jaune des 20m et j’ajuste sur celui des 12m, réglage «cible du jardin » . Ma flèche passe sous la chèvre et les deux chevreuils qui viennent d’apercevoir Francis font demi-tour.
La pluie s’est arrêtée et il y a même quelques rayons de soleil qui percent la frondaison. Les arbres finissent de s’égoutter. Mon regard saute de feuille en feuille à chaque fois qu’une goutte créée un mouvement.
Soudain je perçois un mouvement plus lent à contrejour avec la lisière, une chevrette approche lentement. Elle est encore à 20m, je profite de son passage derrière un buisson et j’arme le PSE, je la suis dans le viseur sans la voir, juste en me calant sur sa vitesse de progression, buissons, arbres, encore une touffe de fougères, encore deux gros arbres, c’est long… je bloque la visée sur une partie dégagée et la chevrette arrive enfin. Je n’en vois que l’essentiel, la partie avant, elle est à 15m quand je presse la détente du décocheur, j’entends le choc de la flèche traversant la cage thoracique. Je sais que la flèche est parfaitement là où je la voulais. La chevrette démarre en trombe et je l’aperçois un peu plus loin dans sa course folle, la patte avant-gauche raide. Un craquement de branche et c’est fini. Je perds un temps fou à vouloir ouvrir mon sac à dos avec les gants trempés pour prendre ma pibolle. Je sonne la mort. J’attends encore quelques minutes et des gilets oranges apparaissent dans la direction de la fuite. J’interpelle : vous l’avez vue ? Réponse : Non. Il n’est pas aussi loin. Je vais voir à l’impact, ma flèche est là, couverte de sang d’un bout à l’autre. Aucune piste visible sur ces feuilles mortes détrempées. Je remonte le parcours de ma victime, 30m depuis l’impact et elle est là couchée dans un entrelacement d’arbres morts. Peu de sang visible, mais à l’éviscération, nous découvrirons une énorme hémorragie interne. La flèche est entrée au sommet de la patte avant gauche et a sectionné veines et artères alimentant le cœur.
Arc PSE SuperShort 55 lbs, flèche Carbon Express cxl hunter 250, lames Montec G5.
Jean-Yves T.